Les pêcheurs sahraouis arraisonnent un navire étranger pour protester
Un groupe de pêcheur sahraouis au chômage se seraient enchaînés à un navire étranger dans le port de Dakhla, pour protester contre le pillage des ressources de leurs pays.
Dans la nuit du 23 avril 2012, 25 pécheurs ont dénoncés leur marginalisation économique au Sahara Occidental, en arraisonnant le navire suédois le « Meya » dans le port de Dakhla, selon des sources locales.
Des habitants de Dakhla ont confirmé à WSRW de façon anonyme que les pécheurs avaient embarqués sur le navire, et s’étaient enchaînés au pont du navire en protestation contre leur exclusion systématique de l’emploi sur les navires de pêche. La manifestation est une réponse à l’exploitation actuelle par le Maroc du sol et des eaux autochtones du territoire qu’il occupe illégalement. WSRW n’a pas reçu d’image de la manifestation.
Les militaires marocains sont arrivés par la suite sur place pour déloger les manifestants du navire. Des sahraouis activistes des droits de l’homme de Dakhla ont depuis quelques temps signalé l’augmentation de la présence militaire à Dakhla, en préparation de la visite du roi Mohamed 6 dans la ville occupée. Après avoir bloqué le navire pendant 13h, le groupe de manifestants a accepté de quitter le navire à condition de pouvoir discuter de leurs revendications avec le ministère de la pêche et de l’agriculture. Une rencontre entre les pêcheurs et les représentants du gouvernement a eu lieu le 25 avril dans le bureau local du ministère concerné. WSRW ne sait pas ce qui est ressorti de cette rencontre.
La Meya battant pavillon de Belize (IMO: 8616142) est depuis janvier 2012 exploité et géré par la compagnie suédoise AB Swemar, elle-même contrôlée par la famille suédoise Kjellberg. En avril 2009, les membres du même groupe ont été inculpés par un tribunal suédois pour des activités de pêche au large des côtes du Sahara Occidental en violation du droit suédois, parmi d'autres navires qui avaient opéré dans les mêmes eaux controversées. L'affaire a été reportée à plusieurs reprises.
La société Pesa Consorcio Ltd est le propriétaire enregistré du chalutier Meya. Pesa Consorcio Ltd créé en 2011est enregistrée au Maroc, mais travaille à partir de l'adresse des gestionnaires suédois dans Västra Frölunda, en Suède. Des sources au Sahara Occidental, disent que le capitaine du navire est Hilmar Snorrason, et que l’équipage du navire est composé de deux suédois et 16 membres d'équipage marocains.
Les pêcheurs sahraouis de Dakhla prétendent que le poisson stocké sur le Meya a été obtenu grâce à des accords avec les généraux et les hommes d'affaires marocains, qui contrôlent le secteur de la pêche au Sahara Occidental occupé. « 71% des captures à bord du navire viennent de Abdelaziz Bennani. Et les 29% restants ont été achetés au groupe commercial marocaine Kabbage ", dit l'un des pêcheurs, qui préfère rester anonyme. WSRW n’a vu aucune preuve de ces affirmations.
Le journal marocain Akhbar Al Youm a publié récemment une liste des principaux possesseurs de licences de pêche. La tête de liste en est l'inspecteur général des forces armées et commandant de l'armée, le lieutenant-général Abdelaziz Bennani. Un télégramme envoyé à Washington en 2008 par l’ambassadeur américain au Maroc de l’époque, Thomas Riley, a déjà évoqué les affaires de Bennani à Rabat, selon le câble Wikileaks 727 08. "Des rapports crédibles indiquent que le Lt Gen Benanni utilise sa position en tant que commandant du secteur sud pour écumer l'argent des contrats militaires et influencer les décisions commerciales. Une rumeur largement admise dit qu'il possède de grandes parts de la pêche au Sahara Occidental. Benanni, comme beaucoup d'officiers supérieurs, a une somptueuse maison de famille, probablement construite avec l'argent glané en pots de vin. Des positions de leader dans des secteurs régionaux sont une source importante de revenus parallèles pour les dirigeants militaires. "
Seulement 9 jours avant la manifestation, le ministère marocain de la pêche et l'agriculture a distribué de nouvelles licences de pêche pour les investisseurs installés dans les territoires occupés du Sahara Occidental, avec l'objectif de les vendre à des sociétés européennes comme une source de revenus alternative à l'accord de pêche UE-Maroc, rejetée par le Parlement européen le 14 décembre 2011. Parmi les bénéficiaires de la nouvelle distribution de licence figure Kabbage imperium.
L'UE envisage de payer le Maroc pour pouvoir pêcher au Sahara Occidental occupé à partir de 2013. L'Accord de Pêche UE-Maroc serait à la fois politiquement controversé et en violation du droit international. La campagne internationale Fish Elsewhere! ("Allez Pêcher Ailleurs!") demande à l'UE d’éviter de telles opérations totalement immorales, et d'aller pêcher ailleurs. Aucune pêche ne devrait avoir lieu au Sahara Occidental avant la résolution du conflit.