Un texte fort exigeant le respect du droit international pour la pêche de l’UE vis-à-vis du Sahara Occidental. Emis le 13 juillet 2009. Débattu au Parlement le 28 janvier 2010.
Notes à l’attention de M. Josep BORRELL FONTELLES Président de la Commission Développement (c/o Mr.Michael WOOD, Secrétariat de la Commission)
Re. Accord de Partenariat dans le domaine de la pêche entre la communauté européenne et le royaume du Maroc – Déclaration par la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) du 21 janvier 2009 d’une juridiction sur une Zone Economique Exclusive de 200 miles marins au large du Sahara Occidental – Prises effectuées par les navires de pêche sous pavillon européen dans les eaux au large du Sahara Occidental.
Par un courrier du 6 mai 2009, reçu au service juridique le 7 mai 2009, vous demandez un avis juridique sur les conséquences juridiques pour l’accord de pêche entre la communauté Européenne et le royaume du Maroc de la déclaration par la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) le 21 janvier 2009 d’une juridiction sur une Zone Economique Exclusive de 200 miles marins au large du Sahara Occidental.
À la lumière de ce qui précède, le service juridique répond aux deux questions comme suit :
"Quant à la déclaration de juridiction sur la ZEE de 200 miles marins au large du Sahara Occidental par la RASD
La déclaration de juridiction sur une ZEE au large du Sahara Occidental par la RASD n’a pas de conséquence juridique sur l’accord de pêche avec le Maroc. Une telle déclaration n’a pas d’effets juridiques pour trois raisons différentes : - La RASD ne jouit pas des caractéristiques d’un Etat - Elle n’est pas et ne peut être un signataire de l’UNCLOS - Le territoire revendiqué est à peine dans une moindre mesure sujet à son contrôle, mais est considéré dans son entier comme un Territoire Non Autonome selon l’article 73 de la charte des Nations Unies.
Quant aux prises effectuées par les navires de pêche sous pavillon européen dans les eaux au large du Sahara Occidental
À la suite d’une série de questions parlementaires à la Commission, il apparaît que les navires battant pavillon européen pêchent dans les eaux au large du Sahara Occidental. Ceci n’est pas seulement établi selon les données fournies par les Etats Membres à la Commission conformément aux obligations établies par la législation de la Commission sur le « contrôle », mais cela a été explicitement reconnu dans plusieurs déclarations de la Commission.
Dans son précédent avis juridique du 20 février 2006, le Service Juridique a noté que, à défaut d’une délimitation claire dans l’accord de pêche de la zone de pêche dans laquelle les navires de l’UE étaient autorisés de pêcher, il ne pouvait être exclu que les navires de la Communauté pêchent dans les eaux du Sahara Occidental. Le service juridique estimait cependant qu’il n’était pas possible alors de préjuger de la façon dont l’accord de pêche serait mis en œuvre. Le service juridique observait que s’il ne pouvait être dit que l’accord de pêche, comme tel, était contraire aux principes du droit international, la mise en œuvre de l’accord de pêche déterminerait si les principes du droit international concernant les droits du peuple du Sahara Occidental étaient ou non, respectés.
Plus de deux ans après l’entrée en vigueur de l’accord de pêche (28 février 2007) une première évaluation de la mise en application de l’accord de pêche peut être faite, particulièrement au regard de la mise en application de la politique sectorielle de la pêche en référence à l’article 7(1)(b) de l’accord et aux articles 6 et 7 du Protocole. La matrice objectifs/résultats de la politique sectorielle de la pêche identifie à la fois des objectifs globaux et spécifiques, et liste les actions à programmer pour atteindre ces objectifs dans la période d’application de l’accord.
Il est à noter d’emblée que cette matrice ne contient pas de mesures particulières explicitement prévues pour bénéficier à la population du Sahara Occidental. Il est exact que certaines mesures prévues dans la Matrice visent les ports de villes situées dans le territoire du Sahara Occidental, comme El Aaiun, Dakhla, et Boujdour. Néanmoins, il n’est pas démontré que la contribution financière de la CE est utilisée au bénéfice du peuple du Sahara Occidental. La conformité avec le droit international exige que les activités économiques relatives aux ressources naturelles d’un Territoire Non Autonome soient menées aux bénéfices du peuple du Territoire et en conformité avec leurs souhaits.
Les actions mentionnées dans la matrice visent essentiellement à améliorer les infrastructures des ports du Sahara Occidental. Ce n'est pas nécessairement égale au bénéfice le peuple du Sahara Occidental dans la mesure où il n’est pas mentionné dans le document de programmation et où l’on ne sait pas si et dans quelle mesure il est en mesure de trouver un avantage à de telles améliorations. Le service juridique n'est pas en mesure d’établir les faits sur le terrain et de conclure que les actions précitées visant les ports du Sahara Occidental bénéficient effectivement au peuple du Sahara Occidental. Cette évaluation doit être faite concrètement sur la base de toutes les informations pertinentes et la Commission Mixte mise en place dans l’accord de pêche a un rôle à jouer dans ce contexte.
Sur la base des éléments actuellement disponibles (prises effectuées par les navires de l’UE dans les eaux du Sahara Occidental, manque de preuve dans le programme annuel et pluri annuel que l’exploitation des ressources halieutiques au Sahara Occidental bénéficie actuellement au peuple Sahraoui) il est fortement souhaitable que la prochaine réunion annuelle, ou une réunion spéciale de la Commission Mixte aborde ces questions afin de trouver un règlement amiable, respectant pleinement les droits du peuple Sahraoui selon le droit international. Si un tel accord amiable ne peut être trouvé, la communauté doit envisager de suspendre l’accord, conformément aux articles 15 et 9 du Protocole, ou de l’appliquer de telle façon que les navires de l’UE soient exclus de l’exploitation des eaux du Sahara Occidental.
Dans le cas où il ne pourrait pas être démontré que l’accord de pêche a été mis en application en conformité avec les principes du droit international concernant les droits du peuple Sahraoui sur ses ressources naturelles, principes que la Communauté est tenue de respecter, la Communauté doit s’abstenir d’autoriser ses navires à pêcher dans les eaux au large du Sahara Occidental en ne demandant des permis de pêche que pour les zones de pêche situées dans les eaux au large du Maroc.
Le service juridique reste à votre disposition pour toute information complémentaire."
L'UE envisage de payer le Maroc pour pouvoir pêcher au Sahara Occidental occupé à partir de 2013. L'Accord de Pêche UE-Maroc serait à la fois politiquement controversé et en violation du droit international. La campagne internationale Fish Elsewhere! ("Allez Pêcher Ailleurs!") demande à l'UE d’éviter de telles opérations totalement immorales, et d'aller pêcher ailleurs. Aucune pêche ne devrait avoir lieu au Sahara Occidental avant la résolution du conflit.